jeudi 31 mars 2011

l'été, j'ai dix-sept ans ; l'hiver, quarante-six millions d'années

à trois je vais m’enfuir et mettre ça sur ton dos
mais la vérité c’est que j’ai froid jusqu’aux os
j’voudrais moins m’enfuir si tu voulais pas de moi
mais j’voudrais bien prévenir les dégâts
j’ai rien à offrir à part trouver des excuses
où tu me fais bien rire à m’exposer tes défauts
j’voudrais bien en rire mais j’ai pas ce qu’il faut
mais j’aimerais ça pleurer sur ton bras
*
les cheveux à yoko c’est oké mais juste sur elle. on se disait ça S. et moi l’autre fois quand on a décidé d’aller shishater au lieu d’assister au cours de fées : « aux grands maux les grands remèdes nous ferons l’école buissonnière ! » hé qu’on était tannantes ce jour-là. oké comme d’habitude mais un peu plus parce que pendant un instant on a cru qu’on avait manqué l’examen. S. adoptait un air terrorisé avec des nœuds dans l’estomac, tandis que moi je m’empiffrais de pupusas en me bidonnant :
- pourquoi tu ris ? c’est PAS drôle !
- écoute, c’est la chose la plus drôle au monde.
- comment tu peux être aussi calme ?
c’est à prendre ou à laisser, comme on dit. moi je laisse, je laisse tellement, je fais ma petite comique, ma maudite feluette. ça fait qu’on m’analyse, on joue au psy à deux sous. peut-être que t’es pas remise de l’autre, peut-être que t’as peur de te laisser apprivoiser, peut-être que t’es juste conne dans le fond. foutu chat sauvage, cré affaire indépendante qui se tanne après deux flattouilles. t’es pas tannée ?
les jeux sont faits. je suis déjà en amour pour la vie avec des gars déjà partis. y’a pu de place dans mon cœur pour qu’il se brise, cherchez pas. pis si ça fait pas mal je colle pas. heye, traite-moi donc comme d’la marde : j’va t’aimer ! awaille, qu’est-ce que t’attends pour pas m’appeler ? pour pas m’écrire ?
- tu fais ta kiki, c’est beau rare !
hé ! ça fait dur. qu’est-ce que j’attends pour vieillir ? qu’est-ce que j’attends pour pas prendre mes jambes à mon cou quand j’ai la chance d’être une princesse ? à part ça, j’ai encore rêvé à la pas contente, à la folle intermittente. c’est fatigant ! si elle pouvait cesser de perdre la face, je serais peut-être moins traumatisée.
- est-tu avec une brune ?
c’est brun longtemps ! sauf que c’est pas la couleur de l’amour. je suis encore là, fille. y’est plus que temps que t’en reviennes. sinon, beigbeder écrit que l’amour dure trois ans. c’tu vrai ça ? tu vas bientôt le savoir, fille. pis après ça, t’auras pu de raison d’avoir peur.

vendredi 25 mars 2011

bibliotheca regia monacensis

c’est un peu pris un peu compliqué. j’ai confié : simon je suis pas capable d’écrire. réponse : parle de choses sick genre à quel point je suis sick. comme si tout le monde le savait pas déjà. ça frenche friendly pis ça a encore besoin de se faire remonter. ça se coupe les cheveux ça fait son frais pis ça me bouscule tout l’après-midi à la bibliothèque.
on arrête pas de soupirer on est un peu tanné. J. boit du n0s pis simon gobe des halls. de temps en temps on se montre des photos drôles et là on rit trop fort : le monsieur d'à côté nous dévisage. à quel âge on arrête d’être des p’tits criss ? parce que sinon je télécharge une dissertation sur les vampires (google livre ftw), et simon à chaque trois secondes se penche vers moi et lit par-dessus mon épaule. ça fait que je me mets à réciter pour nous deux, en prononçant minutieusement tous les mots, caractères loufoques inclus :
heye. c’est tellement drôle des s en f. furtout quand on eft paf cenfé rire pif que le monfieur d’à côté commence à pouffer def petitf bruitf paf contentf.

jeudi 17 mars 2011

il ferait chaud

on se demande un peu. le printemps c’est la tentation. je porte des robes de plus en plus colorées, ça s’approche dangereusement de la robe mauve. c’est excitant. tellement que j’envoie des pensées comme ça, soudainement, à l’improviste. petit partage printanier.
on rit mais on sait déjà. c’est l’ennui, le manque ; et on accepte le prétexte, momentanément comblé. bien entendu c’est une illusion. ça fait partie du jeu. on dirait qu’on serait
jeune                ridicule
naïf                  fatigant
détaché            insistant
nono                tannant
fringant             impatient
innocent           bouleversé
c’est pas nous on le jure ! c’est le printemps !
il me rappelle le texte envoyé aimé commenté. quand je parle de gatsby par exemple il se tait. je le soupçonne de l’avoir brûlé. ça se peut t’sais. sinon sa chatte l’aurait trouvé, aurait encore griffé. avec mon nom dedans ça aurait pas fait long feu.
j’écoute feist. ça fite avec mes talons mes ongles rouges. ça fait fille ben passionnée. quand je me penche mon décolleté s’ouvre et on voit plus de peau encore. des fois je me dis que ça serait cool que je sois assez game pour pas porter de brassière. je fumerais des cigarettes longues et minces je serais tellement libre. pis il ferait chaud.

mercredi 16 mars 2011

« une grande gueule ça se répare-tu ? »

il y a des livres qu’on lit par hasard, par simple bouquinerie. certains ne nous quittent plus. ils laissent une fine trace dans la mémoire, si bien qu’on n’y pense plus. puis un jour on observe sa bibliothèque et on retrouve un de ces livres. on se souvient ; on sourit. c’est la preuve qu’ils n’étaient pas bien loin, qu’ils n’étaient jamais vraiment partis.
la semaine dernière, j’ai réalisé (déjà) que l’auteure d’un livre lu il y a quelques printemps - mon corps étendu dans l’herbe nouvelle - est maintenant ma professeure à l’université.
on dit qu’il ne faut pas confondre les auteurs avec ce qu’ils écrivent. pour moi, la tentation est grande. michèle péloquin n’est peut-être pas ce qu’elle écrit, mais son écriture lui ressemble : douce, fragile.
*
à la brûlerie st-denis dance dance dance joue alors je la choisis aussi sur mon ipod et je l’écoute en double en décalé. je suis folle de même quand j’attends le charme, quand mon cœur menace de lâcher à chaque fois que quelqu’un s’approche de ma table. hey, qui c'est qui a dit que les rendez-vous gallants c’est plaisant ? je vais mourir sti ! les spice girls non merci. dance dance dance encore comme une aliénée dont les pieds arrêtent pas de gigoter les mains de trembler je me demande si ça parait que j’attends quelqu’un. c’est connu les filles tremblent en attendant j’ai l’air d’une feuille d’automne mais c’est le printemps j’ai le cœur qui fleurit ah j’vais mourir j’vous l'dis. à part ça j’ai froid mais pas un froid de froid plutôt un froid de nerfs c’est ben beau. quand le charme va arriver je vais probablement me mettre à pleurer tellement je suis tendue tellement je vais être soulagée. je me demande quelle couleur va être son chandail s’il va regretter de m’avoir invitée s’il va me trouver belle. en tout cas. à 5h30 du matin pu capable de dormir j’ai mis the life aquatic (c’est lui qui me l’a prêté). je l’avais regardé la veille mais pas grave les bonnets rouges me rendent de bonne humeur. (c’est ben long prendre le métro c’est ben loin son université de ligne bleue. – sleeping sickness ça va, je sais pas s’il connait ça.) mais ouais steve zissou ben mignon avec son speedo. would you like to join my crew ? i want you on team zissou ! bon je retourne à bowie c’est de circonstance t’sais. mais je suis pas plus capable de vivre voyons c’est quoi mon problème ? that’s what casual people do !


les bons débarras



« j'pas un perroquet.
- qu'est-cé que t'es ?
- une p'tite bâtard de viarge, tu me l'as dit l'autre fois.
- c'est des mots d'amour, ça. on répète pas ça.
- tu m'aimes quelque chose de rare.
- j’t’aime à mort. »

mercredi 9 mars 2011

petites crêpes

quand je décide de manger des crêpes, je provoque un chaos infernal dans la cuisine. je sors tout je mets de la farine partout. j’abuse du beurre je fais des tourbillons dans la casserole. le poêle lui-même s’occupe de faire cuire des versions miniatures de crêpes. ça fait un beau ciel étoilé ben plate à nettoyer.
chaque fois ça me prend environ cent ans. je m’installe à la table avec une assiette pleine de crêpes chaudes. j’emmène le sirop d’érable, le nutella, la confiture, le beurre de peanut, la compote de pommes, la cassonade. je regarde d’un air satisfait la table remplie et c’est là que je choisis. mais t’sais, tout ça pour ça. je mange quoi une crêpe au complet ? en tout cas.
j’avais invité simon le saumon mais il était déjà de l’autre côté du fleuve. ça l’a déconcentré. alors je lui ai demandé de m’aider à choisir à quoi manger ma crêpe : sirop d’érable (normal), nutella (correct), ou beurre de pin + cassonade (intense). là il s’est fâché contre moi.
je me demande s’il est encore mon ami.

mardi 8 mars 2011

petits bleus

je sais pas si c’est le décor excessivement blanc, ou l’éclairage pur, accentué par le ciel bleu et le tapis de neige… mais quoi qu’il en soit, je m’ennuie de mon chat. avant, quand la maison était déserte, je m’installais sur la table de la salle à dîner pour rédiger et boire d’innombrables tasses de café et de thé. mon roux de chat venait se coucher sur le divan à côté du foyer. alors je faisais un feu et on se blottissait ensemble, il posait une petite patte sur ma joue en ronronnant. j’attendais l’inspiration comme ça pendant quelques minutes, et après je pouvais attaquer mes travaux.

c’est con les chats qui meurent. qui se noient dans une piscine au mois de novembre. c’est morbide aussi, et laid (et un peu drôle aussi car c’est saugrenu). mais ce qui arrive c’est qu’on se rend pas compte à quel point ils importent. ils sont mous, les chats, se déplacent à pas feutrés pour mieux s’écraser ailleurs. le mien me saluait le matin, ou lorsque je rentrais le soir. s’il n’était pas profondément endormi, il me suivait dans la maison, à l’affût de ma routine. l’été, dehors, il chassait les papillons, entrait en conversation avec la chatte d’un voisin… bref, il était si présent et ça devenait tellement habituel que j’en venais presque à trouver ça banal.


et pourtant.

les roulés suisses

karkwa ces temps-ci m’inonde les oreilles. je l’avais écrit mais mon sang dilué provoquait des envolées un peu trop intenses ; j’ai eu peur de l’effrayer. je disais plein de choses pas possibles, posais trop de questions vagues sans reprendre mon souffle (celui de mes doigts genre). j’ai eu peur qu’il ait les yeux fatigués les réponses épuisées.

les chansons en boucle ça nous connait. je le sais parce qu’il a renchéri avec des mots fous lui aussi. parce qu’on s’est retrouvé côte-à-côte à dessiner des animaux étranges, formés de brocolis.
« mais perséides tu connais ça m’avait obsédé comme.
- ben non, dis-moi pas ça ! t’es pas en train de me dire ça ! »

(j’ai écrasé mes roulés suisses en voulant écrire en marchant dans le métro.
en passant ça ça se mange par étapes :
le chocolat autour
le chocolat des deux extrémités
le chocolat qui scelle le rouleau
après ça on déroule et
on attaque la crème et le gâteau.)

alors on a réalisé qu’on était allé à la même école primaire. lui il est un peu plus vieux alors on n’avait jamais été dans la même classe. mais on était passé par les mêmes professeurs. on avait vu les mêmes petits œufs tenus au chaud sous les lampes, éclos en d’adorables poussins qui puent. vécu les mêmes bouchées-collations à vingt-cinq sous, les mêmes conseils de coopération je félicite marie je critique samuel. ça faisait drôle.

samedi 5 mars 2011

la sweet factory

à la sweet factory je me gâte les bonbons en attendant les autres. en engloutir autant avant une soirée aux côtés du charme risque d’être dangereux. le sucre ça fait dire n’importe quoi n’importe comment et à voix haute. ça met l’âge à la bonne place, à l’enfance, mais ça rend hyperactif et des fois ça en irrite quelques un. c’est pas sérieux.
à partir de maintenant, ma vie consiste à réussir à faire headspin. j’ai tellement de sucre dans le corps que je pourrais me retrouver la tête renversée sans crier gare, comme la section des sciences tiens. je voulais te montrer regarde le meuble finit là mais la section continue là-bas ça fait aucun sens mais au moins maintenant tu le sais regarde.
moi pis les choses qui font aucun sens.
continue voir de me montrer la section qui s’étale n’importe comment que je me tienne près de toi en disant oui oui tu parles d’une histoire. après ça on s’imaginait perdu les yeux bandés à la recherche de la section des sciences. on avait envie de jouer à tu brûles tu brûles non tu refroidis là t’es au pôle nord pis oh là tu te rapproches des tropiques.
pis là on dirait que les tropiques seraient moi ha ha (sauf que ça c’est un secret t’sais.)
headspin ouais. il me semble que si je pouvais tourner sur la tête ma vie serait plus réussie. si je pouvais faire du break comme je respire. à l’envers. même si mes heures de pratique laissent des bleus sur mes genoux mes coudes.

jeudi 3 mars 2011

la mort en papier

ma mère ne voulait pas me dire ça au téléphone, sauf que ça commençait à urger : il fallait qu’elle me parle de son testament. ça m’excitait pas tellement mais elle m’a annoncé une belle nouvelle, elle m’a dit que tous ses bijoux seraient à moi.
ma mère adore les bijoux, elle porte de jolies bagues qui vont bien à ses doigts. elle attache sous ses cheveux des colliers d’ambre qui font briller ses joues. parce qu’elle a de belles tâches de rousseur, ma mère, et ça lui donne un air taquin de petite fille. elle, elle aime pas ça mais je suis certaine que tous les hommes qui l’ont aimée se souviennent de ses joues, je suis certaine qu’ils s’en mordent les doigts.
elle m’a dit qu’elle avait eu une idée un peu étrange : elle pensait offrir son corps à la science. elle m’en parlait parce qu’elle voulait savoir mon avis. moi, j’étais une fois de plus interloquée par la synchronisation de la vie. je venais de terminer les enfants moroses, dont l’une des dernières nouvelles se déroule à l’exposition bodies :

« dans la dernière salle, elle s’est arrêtée devant une petite affiche. on y invitait les personnes intéressées à inscrire leurs coordonnées sur un coupon pour obtenir des documents d’information sur le don de corps et d’organes à la science. quand je l’ai vue chercher un crayon dans son sac, j’ai paniqué.
- non.
elle a levé les yeux vers moi.
- c’est seulement par curiosité.
- non.
je ne tolérais pas l’idée qu’un jour, elle rejoindrait les corps de l’exposition. pour toujours figée dans une pose, une expression qui ne seraient pas elle.
- ces corps sont anonymes, on ne sait pas à qui ils appartenaient. personne ne peut les reconnaître. ils n’ont plus aucune famille.
j’avais les larmes aux yeux, soudainement.
sarah ne m’a pas regardée, mais elle a cessé d’écrire.
- je ne veux pas être ici, je ne veux pas que mon corps soit ici un jour. et tu n’aimes aucun sport.
elle a froissé le papier et l’a glissé dans l’une de ses poches avant de poser sa main sur mon bras.
- d’accord, n’y pensons plus. »
lorsque ma mère lui en a parlé, mon petit frère a eu sensiblement la même réaction.
« pense à nous », il a dit, « t’es ma maman, je veux pas que ma maman soit taillée en morceaux. » mon grand frère a répondu comme un sage : que ta volonté soit faite.
moi je savais pas parce que de toute façon ma maman mourra jamais.

mardi 1 mars 2011

ça me tire les cheveux

ma bouche est remplie de dents contre toi

prends-moi, prends-moi pour quelqu’un d’autre
et ne le dis jamais
tes goûts pris pour acquis me dégueulent. tu parles et ça met des bâtons dans mes roues. ça me fait tomber de ma chaise.

ça me tire les cheveux.

j’ai des nœuds dans les idées quand
tu dis je suis sage j’aime la poudre regardez comme je suis beau la fille est donc ben grosse j’ai changé faire semblant c'est cool je suis tellement gentil.

t’envoyer à la guillotine
pour savoir vraiment ce que tu dis quand
tu souffres

pour vrai.

je suis dupe de ton spectacle comme tous ceux pour lesquels tu ne baisses pas le masque. pour lesquels tu brasses les cartes, condescendant. tu me donnes envie de pleurer de rage. mais ça te ferait trop plaisir.

les enfants moroses

- fannie loiselle.

« j’ai glissé la bague de plastique à ton annulaire. une sucette en forme de diamant y trônait. tu as tendu ton bras pour admirer l’effet. le bonbon était rouge, à saveur de cerise.
nos visages étaient plongés dans la pénombre.
- tu crois que je pourrais emporter des bonbons dans l’au-delà ?
- sûrement. mais avant d’y accéder, tu devras subir la pesée du cœur.
- ah.
- ton cœur sera déposé sur un plateau. sur l’autre plateau il y aura une plume. si ton cœur et la plume s’équilibrent, tu auras accès à la vie éternelle.
- et s’il est trop lourd ?
- il sera dévoré par un monstre affreux.
- tu crois que ton cœur est aussi léger qu’une plume ?
- sûrement pas. »